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Louis Doucet: une vision claire de l'art sur epaper



Mon ami Louis Doucet a accepté d' écrire un texte relatif à mon travail sur epaper.
Il sera publié prochainement, lors de l'exposition à la galerie Bernard Ceysson.
Ses quelques lignes exposent, avec clareté, sa vision tellement juste de l'art numérique sur epaper.
Voici son texte:

Gilles Guias, graveur du virtuel

Dans ses œuvres sur e-paper, Gilles Guias transpose l’art de la gravure en taille douce, technique ancestrale, dans cet univers virtuel qui caractérise le début de notre XXIe siècle.

Les parentés formelles sont, en effet, nombreuses entre l’écran d’un lecteur d’e-paper et une estampe au burin ou à la pointe sèche. Tout d’abord la dialectique noir-blanc, commune aux deux techniques, dans des traits incisifs, inflexibles, distanciés par l’intermédiaire de l’outil et de la résistance du métal ou de la palette graphique. La spontanéité qui caractérise le dessin ou la lithographie est ici contenue et endiguée par l’exercice d’une technique lentement maîtrisée et par un matériau qui résiste et contrarie la fluidité naturelle du geste. Le format, ensuite, réduit, presque précieux, mis en valeur par de grandes marges en réserve, fait de ces deux types d’artefacts des objets de lente délectation, à savourer dans l’atmosphère d’un cabinet de curiosités, à l’opposé des cimaises grandiloquentes de nos musées organisateurs de spectacles. La notion d’état, enfin, renouvelée par l’e-paper. Un seul subjectile permet de visualiser, en quelques minutes, les étapes successives de la pensée et du geste de l’artiste, ce qui, pour l’antique amateur d’estampes, pouvait constituer la quête d’une vie.

En 1935, Walter Benjamin, dans son essai L’Œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, constatait la perte de l’aura de l’œuvre d’art, conséquence de l’avènement des techniques et moyens de reproduction de masse que sont l’imprimerie, la photographie et le cinéma. Soixante-dix ans plus tard, Gilles Guias recourt à des moyens de diffusion et de reproduction de masse pour redonner à l’œuvre sa vibration originelle, incitant à une communication quasi mystique, à l’instar des icônes des églises orthodoxes. La multiplication n’est plus, ici, synonyme de désincarnation et de perte d’autonomie, mais vecteur d’affirmation d’une très matérielle identité.

Louis Doucet, décembre 2008


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